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[AGENCE MONDIALE ANTIDOPAGE C/ MONSIEUR SUN YANG ET FEDERATION INTERNATIONALE DE NATATION (WORLD AQUATICS)]

Dernière mise à jour : 13 mai 2024

[DOPAGE - NATATION - PREUVE - DESTRUCTION - TRIBUNAL ARBITRAL DU SPORT - TRIBUNAL FEDERAL SUISSE ]

Monsieur SUN Yang est un nageur chinois de niveau international.

 

Durant la nuit du 4 septembre 2018, l'athlète a fait l'objet d'un contrôle antidopage hors compétition ordonné par l’autorité de contrôle Fédération Internationale de Natation (« FINA »). L’autorité de la collecte des échantillons International Doping Tests and Management (« IDTM ») a, par délégation par World Anti-Doping Agency (« WADA »), procédé au prélèvement des échantillons d’urine et de sang. Plus précisément, entre 22 :00 et 23 :00 heures au soir du 4 septembre 2018, trois personnels de prélèvement des échantillons :


· une agente de contrôle du dopage («Doping Control Officer – DCO») ;


· une assistante chargée d'effectuer les prélèvements sanguins («Blood Collection Officer - BCA») ; et


· un assistant de sexe masculin («Chaperone - DCA»)


se sont rendus au domicile de Monsieur SUN en Chine, accompagnés d'une quatrième personne (l'épouse du DCA) qui n'a pas pris part au contrôle antidopage.  

 

A la demande de Monsieur SUN, ces personnels ont fourni leurs documents de légitimation («credentials») :

 

· La DCO a présenté une copie de sa carte d'identité délivrée par IDTM ainsi qu'un document de la FINA destiné à IDTM, intitulé « Letter of authority », signé par le Directeur exécutif de la FINA. 


· La BCA a présenté une copie de son certificat d'infirmière junior, intitulée « Specialized Technical Qualification Certificate for Junior Nurses ».


· Le DCA a présenté sa carte d'identité nationale. 

 

Les échantillons de sang ont été récoltés et placés dans des récipients en verre, scellés et conservés dans une boîte de rangement réfrigérée. 

 

Peu après, l'athlète a remis en question l'accréditation du DCA désigné par la DCO.

 

· Le DCA et la BCA avaient signé des documents établis par IDTM sur la formation et la confidentialité.


· La DCO ne possédait pas lesdits documents, dès lors que ceux-ci étaient conservés dans les fichiers d'IDTM.

 

En réponse aux interrogations de Monsieur SUN, le responsable de l'équipe nationale chinoise de natation a indiqué que les accréditations du personnel de prélèvement des échantillons ne répondaient pas aux exigences requises. 

 

La conduite du DCA (notamment la prise de photographies litigieuses par téléphone désormais supprimées) a également été remise en cause. Le DCA a été exclu de la mission de contrôle et aucun échantillon d'urine n'a pu être récolté, le DCA étant le seul homme de l'équipe de prélèvement. 

 

Aux alentours d'une heure du matin, le médecin personnel de Monsieur SUN l'a rejoint sur place et a constaté que la BCA ne possédait pas non plus les accréditations nécessaires. Avec son collègue, consulté téléphoniquement, ils ont estimé que les échantillons de sang prélevés ne pouvaient pas être emportés par la DCO. 

 

La DCO a suggéré de transmettre les échantillons de sang prélevés au laboratoire agréé par l'AMA, situé à Pékin, jusqu'à la résolution du problème relatif aux accréditations du personnel de prélèvement des échantillons.  

 

Monsieur SUN et son médecin personnel ont indiqué qu'ils entendaient briser les récipients en verre en vue de récupérer les échantillons de sang.

 

Ensuite, la DCO a témoigné un agent de sécurité briser l'un des récipients en verre scellés à l'aide d'un marteau, Monsieur SUN l'assistant dans cette tâche en projetant de la lumière au moyen de son téléphone portable. Monsieur SUN a également déchiré le formulaire de contrôle du dopage qu'il avait préalablement signé. 

 

Le médecin personnel de Monsieur SUN a retranscrit, dans une note manuscrite, les remarques de Monsieur SUN relatives au contrôle antidopage, signée par la DCO, la BCA, le DCA, Monsieur SUN et son médecin. 

   

Le processus de contrôle s’est achevé peu après 3 :00 heures du matin. Les premiers échantillons sanguin abandonnés ont été collectés par la mère de Monsieur SUN. L'équipe IDTM est repartie avec son matériel. Le médecin personnel de Monsieur SUN a gardé le deuxième échantillon sanguin.

 

Aucun échantillon n'a pu être analysé à l'issue dudit contrôle.

 

Le 3 janvier 2019, la commission antidopage de la FINA a rendu une décision d'acquittement de Monsieur SUN. Le contrôle antidopage a été déclaré nul, notamment pour des raisons de vices procédurales (notamment l'insuffisance de la preuve sur la qualification des agents de contrôle, le comportement inapproprié du DCA en la prise de photographies de l'athlète et le processus de notification de l'athlète irrégulier).


Le 7 janvier 2019, la décision de la FINA du 3 janvier 2019 a été notifiée à l'Agence antidopage chinoise (CHINADA).


Le 14 février 2019, l'AMA a interjeté appel auprès du Tribunal arbitral du sport (« TAS ») contre Monsieur SUN.


Le 18 février 2019, la demande d'appel a été modifiée pour joindre FINA à la procédure.

 

Le 15 novembre 2019, l’audience s’est déroulée en audition publique à Montreux, en Suisse.

 

Le 28 février 2020, le TAS a annulé la décision de la FINA du 3 janvier 2019. Monsieur SUN a été sanctionné d'une période de suspension de 8 ans (facteur aggravant en cas de récidive : existence d’un antécédant de dopage en 2014) (CAS 2019/A/6148) ainsi que d'une annulation résultats obtenus en compétition entre le 4 septembre 2018 et le 28 février 2020. 

 

« Aucun échantillon de sang ou d'urine n'a été analysé dans le cadre de la mission OOC menée par l'IDTM. Du sang a été prélevé, mais le récipient contenant le sang a été détruit et l’échantillon du sang prélevé n'a jamais été envoyé au laboratoire accrédité par l'AMA. L‘échantillon de sang reste en possession du médecin personnel de l'athlète. Aucun échantillon d'urine n'a été fourni par l'athlète. On peut sans doute décrire l'ensemble de la mission des COO comme étant problématique, très inhabituelle et, parfois, conflictuelle. La FINA et l'athlète donnent des explications très différentes sur ce qui s'est passé, pourquoi l’évènement s’est déroulé comme il l’a été, et, surtout, quelles conséquences doivent en découler. »


(§17, CAS 2019/A/6148 ; Articles 5.3.3, 5.4.1 (b) et 5.4.2 (b) du Standard internationale pour les essais et les enquêtes (« ISTI »))


Le 28 avril 2020, Monsieur SUN a formé un recours en matière civile au Tribunal fédéral aux fins d'obtenir l'annulation de la sentence arbitrale du 28 février 2020 (4A_192/2020).

 

Le 15 juin 2020, Monsieur SUN a en outre présenté une demande de révision de la sentence du 28 février 2020 mettant en cause la partialité de l'arbitre-président (4A_318/2020).


Le 22 décembre 2020, le Tribunal fédéral de Suisse a admis la demande de récusation et a annulé la sentence arbitrale.

 

Le 28 décembre 2020, le TAS a ordonné la réouverture de la procédure.  


Le 30 décembre 2020, Monsieur SUN a soumis au CIAS des requêtes de récusation visant les deux arbitres ayant siégé aux côtés du président de la Formation dont la récusation avait été ordonnée par le Tribunal fédéral. 


Les deux arbitres en question ont démissionné les 20 et 21 janvier 2021. 


Par ordonnance du 22 février 2021, la cause 4A_192/2020 a été rayée du rôle, le recours étant devenu sans objet. 


Une audience a été tenue par vidéoconférence du 25 au 27 mai 2021.

Par sa sentence arbitrale du 22 Juin 2021, le Tribunal Arbitral du Sport a :


· Annulé la décision rendue le 3 janvier 2019 par la Fédération Internationale de Natation;


· Sanctionné Monsieur SUN d'une période de suspension de 4 ans (infraction) et 3 mois (récidive) , à compter du 28 février 2020;


· Décidé que l'annulation des résultats obtenus par l'athlète entre le 4 septembre 2018 et le début de la période de suspension n'était pas justifiée.


(TAS 2019/A/6148)


Il a notamment été jugé que :


- Les règles de l'ISTI requièrent exclusivement l'identification de la personne en charge de la notification du contrôle et non celle des autres membres du personnel de prélèvement des échantillons. Ainsi, seule la DCO devait fournir une identification supplémentaire, dès lors que c'est la DCO qui a procédé à la notification du contrôle antidopage. Le DCO est le garant tant de l'identité que des qualifications des autres membres du personnel de prélèvement des échantillons.

- Le fait de présenter une lettre d'autorisation délivrée par l'autorité de contrôle (telle que l'IDTM) est suffisant pour attribuer la compétence au personnel de prélèvement des échantillons de procéder au contrôle antidopage.


- Il n'a pas été établi que le droit chinois prohiberait le recours à une infirmière, en dehors de certaines zones géographiques déterminées, en vue d'effectuer un prélèvement sanguin à des fins de lutte antidopage. L'infirmière en l'espèce a été instruite et formée par la DCO en vue de pouvoir agir en qualité de BCA, et possédait toutes les qualifications médicales requises pour accomplir ses devoirs. Elle disposait notamment d'un STQCJN et d'un PNC.


- Le DCA semble avoir été recrutée à la dernière minute avec un minimum d'instructions et de formation. Elle a été rapidement exclue de la collecte d'échantillons. Néanmoins, le rôle du DCA, lors du contrôle antidopage, reste basique puisqu'il consiste uniquement à surveiller l'athlète lors du prélèvement d'échantillons d'urine, afin de s'assurer qu'il n'y a aucune manipulation. L'entraînement requis doit être apprécié au regard de la mission confiée au DCA. Observer une personne uriner ne requiert pas une formation poussée. Même une formation relativement brève dispensée par un DCO peut suffire pour permettre au DCA de remplir sa mission.


- Le fait de prendre des photographies d'un athlète, sans son accord, est un comportement inapproprié et non professionnel, justifiant l'exclusion du DCA de la procédure et l'abandon du prélèvement d'échantillons d'urine. Monsieur SUN ne peut être reproché d'avoir failli à son obligation de fournir des échantillons d'urine et d'avoir enfreint les règles antidopage à ce titre. Cela étant, le DCA ne peut être tenu responsable de l'échec du prélèvement des échantillons de sang.


- Un athlète professionnel est présumé connaître les processus liés aux contrôles antidopage, les conséquences d'une obstruction au contrôle et la gravité de la sanction en cas de violation des règles antidopage. Un athlète expérimenté doit faire preuve de la plus grande prudence lorsqu'il conteste la validité d'un prélèvement d'échantillons. Un athlète peut formuler par écrit des observations ou émettre des critiques relatives au déroulement d'un contrôle antidopage, et de contacter l'autorité de contrôle par la suite. Le contrôle antidopage litigieux n'était certes pas exempt de toute irrégularité; il n'était cependant pas entaché de vices si manifestes que le comportement dramatique de l'athlète pouvait trouver une justification valable.


- Monsieur SUN a violé les Articles 2.3 et 2.5 du Règlement antidopage de la FINA, lorsqu'il a refusé de laisser la DCO emporter avec elle les échantillons sanguins.


Le 23 août 2021, Monsieur SUN a formé un recours en matière civile au Tribunal fédéral aux fins d'obtenir l'annulation de la sentence du TAS du 22 juin 2021. Sa demande est formulée notamment sur le fondement de non-respect du délai d'appel au TAS, la violation de son droit d'être entendu, et la contrariété à l'ordre public matériel ainsi qu'au droit à un recours effectif.


Le 14 février 2022, le Tribunal fédéral a prononcé le rejet du recours dans la mesure où il est recevable



 
 
 

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