🏥 Remboursement des primes différencielles illégales : l'affaire des médecins étrangers PADHUE
- Habbine Estelle Kim
- 21 juil.
- 3 min de lecture

Depuis juin 2025, près de cinquante médecins étrangers diplômés hors Union européenne (PADHUE), recrutés par le Grand Hôpital de l’Est francilien (GHEF) - un établissement issu de la fusion des hôpitaux de Meaux, Coulommiers et Marne-la-Vallée en Seine-et-Marne - ont reçu l’ordre de rembourser des primes dites « différentielles », pouvant atteindre jusqu’à 100 000 €, remboursables sur une période échelonnée de deux ans. Ces primes, versées mensuellement pendant plusieurs années et inscrites dans les contrats de travail ainsi que sur les bulletins de salaire, ont été supprimées rétroactivement par la nouvelle direction. Celle-ci considère désormais ces primes ou avantages financiers comme non prévus par un texte réglementaire, et justifie cette démarche par la nécessité de répondre à une demande du Trésor public, relative à un montant total de 2,7 millions d’euros.
Face à cette décision, plusieurs médecins étrangers ont engagé des recours devant le tribunal administratif, afin d’obtenir l’annulation de l’injonction de remboursement des primes perçues.
Ils invoquent une rupture unilatérale du contrat de travail, opérée sans base réglementaire explicite, ainsi qu’une atteinte manifeste à la sécurité juridique. Ces contestations soulignent non seulement la fragilité contractuelle des praticiens diplômés hors UE (PADHUE), mais aussi les conséquences systémiques de cette situation. Sur le plan opérationnel, la mesure engendre une surcharge des hôpitaux locaux, déjà fragilisés par la crise de la démographie médicale. Sur le plan institutionnel, elle contribue à installer un climat délétère pour l’attractivité hospitalière, dissuadant les talents étrangers de rejoindre le service public.
Sont également mises en avant les conséquences personnelles et professionnelles majeures engendrées par cette suppression unilatérale et rétroactive d’une clause contractuelle essentielle. Les médecins concernés font état d’un effondrement économique brutal (perte de revenus pouvant dépasser 2 000 € mensuels), de souffrances psychologiques (burn-out, arrêts de travail prolongés), mais aussi de démissions multiples menaçant directement le fonctionnement (et la survie) de certains services hospitaliers. À terme, cette instabilité pourrait accélérer la désertification médicale locale, en fragilisant encore davantage l’accès aux soins dans des zones déjà sous-dotées.
Ainsi, ces recours pourraient soulever plusieurs questions centrales de droit public hospitalier : la légalité d’une suppression rétroactive de primes contractuelles, le respect des droits acquis, ou encore la responsabilité de l’administration en cas d’erreur manifeste.
NB : Les primes d’attractivité sont couramment utilisées par les établissements hospitaliers pour attirer des médecins dans les zones en tension, souvent qualifiées de déserts médicaux.
La pénurie de praticiens reste une réalité bien documentée, reconnue par le Premier ministre François Bayrou lui-même. Celui-ci a écarté toute mesure coercitive concernant la liberté d’installation des médecins, dans le cadre du « Pacte de lutte contre les déserts médicaux » présenté le 25 avril 2025. Ce plan a été dévoilé aux côtés de plusieurs membres du gouvernement : Catherine Vautrin (Santé, Travail, Solidarités, Familles), Yannick Neuder (Santé), Philippe Baptiste (Enseignement supérieur et Recherche), et Françoise Gatel (Ruralité).
Dans ce texte stratégique, le gouvernement choisit d’introduire un principe de solidarité territoriale entre médecins, plutôt que de restreindre leur liberté d’installation, considérée comme un droit fondamental dans l’exercice libéral.
Cette prise de position marque un rejet clair de la proposition de loi transpartisane portée par le député socialiste Guillaume Garot, adoptée à l’Assemblée nationale le 2 avril 2025, qui envisageait une autorisation préalable par les ARS pour toute nouvelle installation de cabinet médical dans certaines zones surdotées.
À l’inverse, le plan gouvernemental s’aligne davantage sur les orientations du Sénat et notamment du sénateur Philippe Mouiller, auteur d’un contre-projet plus libéral, soutenu par les sénateurs Les Républicains.




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